Et si on redonnait l'envie de devenir éducateur spécialisé ?
09 May 2025/image%2F6918983%2F20250509%2Fob_370b1c_1000051905.png)
Je suis éducateur spécialisé. Et je me pose souvent cette question : pourquoi les jeunes ne viennent-ils plus vers ce métier ? Un métier qui, malgré ses difficultés, est l’un des plus riches humainement. Un métier où l’on accompagne des vies cabossées, où l’on restaure la confiance, où l’on soutient sans juger. Un métier où l’on apprend autant qu’on transmet.
Je ne cherche pas à l’idéaliser. Je connais ses limites, ses fractures, ses fatigues. Mais je crois profondément qu’il mérite mieux. Il mérite d’être regardé autrement. Et il mérite que l’on donne envie aux nouvelles générations d’y entrer.
Aujourd’hui, je comprends ceux qui hésitent. Le manque de reconnaissance est criant. Le salaire est trop bas pour la responsabilité portée. Les conditions de travail sont dures, les équipes souvent à bout, les structures parfois abandonnées. Comment parler de vocation quand on peine à joindre les deux bouts ? Quand on rentre chez soi vidé, inquiet, sans possibilité d’évolution ? Il faut cesser de demander aux éducateurs d’être des héros silencieux.
Et pourtant, je reste convaincu que ce métier a un avenir. À condition qu’on l’écoute, qu’on l’accompagne, qu’on le revalorise.
Redonner envie, ça commence par le sens. Il faut raconter ce que ce métier change. Pas seulement pour les publics accompagnés, mais pour la société dans son ensemble. Il faut montrer les réussites, les petites victoires du quotidien, les liens reconstruits, les jeunes qui reprennent pied, les familles qui respirent à nouveau.
Redonner envie, c’est aussi aller à la rencontre des jeunes. Dans les lycées, les facs, les MJC, les réseaux sociaux. Leur dire que ce métier est vivant, varié, qu’il touche à l’éducation, à la justice, à la culture, à la citoyenneté. Leur proposer des stages, du service civique, des immersions, des témoignages. Leur dire la vérité : oui c’est dur, mais oui, ça a du sens.
Et puis, il y a une évidence qu’on ne peut plus contourner : il faut mieux payer. Être éducateur, ce n’est pas faire vœu de pauvreté. C’est un métier avec des compétences, une expertise, une formation longue et exigeante. Il faut une revalorisation salariale réelle, des perspectives de carrière, des passerelles vers d’autres responsabilités. Il faut en finir avec l’épuisement et la précarité.
Je crois qu’on peut y arriver. Je crois qu’il est encore temps de redonner de la fierté à ce métier. De le rendre visible. De le rendre désirable. Parce que la société a besoin d’éducateurs. Elle a besoin de celles et ceux qui tendent la main quand tout semble s’effondrer. Elle a besoin de justice, d’accompagnement, de solidarité.
Alors moi, je continue à y croire. Et j’invite celles et ceux qui doutent à venir voir. À pousser la porte. À écouter, à observer, à sentir ce qui se vit sur le terrain. On n’en sort jamais indemne. Mais on en sort grandi.